Vulgarisation scientifique | MANIPULE-T-ON TES CONCEPTIONS ?
La scientifique
« La théorie synthétique de l’évolution démontre que l’être humain n’est pas un aboutissement évolutif.
Toutes les espèces actuellement vivantes sont le résultat d’une chaine continue d’ancêtres «suffisamment adaptés» à leur environnement.
La comparaison entre espèces est donc toute relative !
Il n’y en a pas de plus ou de moins évoluées.«
La religieuse
« Dans la Genèse, il est dit que Dieu a créé l’homme « à son image » et qu’il l’a placé au sommet de la création. »
La prof de yoga
« L’être humain est au sommet de la pyramide de l’évolution.
Et oui, il est bien capable d’envoyer des satellites dans l’espace grâce à sa connaissance de la force de gravité.
C’est bien une preuve de sa supériorité, non ?
Mais le fait d’être au-dessus de toutes les créatures, lui donne une grande responsabilité, celle de protéger les êtres vivants.«
Scientifique, religieux ou prof de yoga, tous ont leurs propres conceptions. Alors comment s’y retrouver ?
Vous aussi, vous avez observé que ces conceptions se mélangeaient sur les réseaux sociaux et vous ne savez pas comment les trier ?
En tant que médiateurs ou en tant qu’enseignants, vous avez remarqué que le résultat des publications scientifiques sont de plus en plus souvent tenus pour douteux ou inacceptables ?
Alors je pense qu’il est temps de questionner nos conceptions, d’éclairer quelques concepts essentiels pour nous aider à mieux décrypter l’information.
Sciences, croyances ou opinions ?
Et oui, les conceptions en matière d’évolution du scientifique, de la religieuse ou de la prof de yoga sont de nature différente.
L’information qu’elles nous délivrent ne peut pas être interprétée de la même manière. Elles ne sont pas équivalentes dans la mesure où elles servent des objectifs différents.
Comment faire la part des choses alors? Allez, je vous présente quelques outils.
Méthode scientifique
Toute connaissance scientifique est basée sur la méthode décrite par le philosophe et mathématicien français, René Descartes, au XVIIesiècle. Cette philosophie rationaliste est encore la base de la science moderne.
La méthode scientifique passe par trois étapes importantes :
- D’abord, le scientifique réalise lui-même ses expériences.
Il les répète pour s’assurer que les résultats obtenus sont reproductibles. - Ensuite, le chercheur documente ses résultats.
Chaque publication scientifique constitue un constat élémentaire. - Enfin, ce sont les preuves, les conclusions d’expériences répétées par la communauté des chercheurs qui permettent d’asseoir une hypothèse.
C’est donc bien l’acceptation d’une preuve par de nombreux chercheurs qui conduit à un consensus sur l’explication d’un phénomène. Il va sans dire que l’explication n’est jamais absolue et qu’elle peut être remise en question si de nouveaux faits viennent contredire l’hypothèse existante.
Dans la vie courante, il y a parfois des situations où les contraintes de la vie civile semblent irréconciliables avec la méthode scientifique. C’est ce que nous a démontré par exemple la pandémie de coronavirus.
Une théorie scientifique tient tant qu’une quantité de preuves contradictoires suffisantes n’a pas été accumulée pour la remettre en question. C’est donc une démarche qui demande du temps et des remises en question régulières.
Dans une situation d’urgence sanitaire, les politiques ont besoin de réponses claires et définitives pour agir !
Et oui, le temps de la science et celui de la politique n’est pas le même.
Croyance
Les systèmes de croyances sont arrivés aux débuts de l’humanité, à un moment donné où elle n’avait pas les outils conceptuels pour penser la révolution du soleil, le tonnerre ou l’apparitions de la vie.
L’humanité cherchait à répondre aux grandes questions existentielles : « Qui sommes-nous ? », « D’où venons-nous ? », « Où allons-nous ? ».
Apporter des explications était un moyen de se rassurer, d’ordonner son environnement.
C’est ainsi qu’ont émergé les croyances en de grands principes fondateurs et l’émergence du surnaturel.
Et ce n’est pas un phénomène isolé !
Partout dans le monde, les populations humaines ont imaginé des récits fondateurs qui explique les origines de l’univers et les systèmes qui le régissent.
Il est intéressant d’observer que les populations ont souvent puisé leur inspiration dans ce qui était le plus immédiat pour elles, c’est-à-dire dans leur environnement direct.
Il en est de même des grandes religions qui ont instauré des systèmes de valeurs et ordonné la vie de la population. On peut se souvenir à quel point la vie des individus était dicté par de grands principes moraux, au Moyen-Age par exemple dans nos régions.
Opinion personnelle
Pour le média belge Daily Science, un média de vulgarisation scientifique, l’opinion personnelle repose en partie sur des arguments démontrables rationnellement mais aussi sur des croyances, au sens de confiance que l’on met dans une assertion dont on ne dispose pas de tous les éléments de démonstration.
Il me semble important d’évoquer la question de l’opinion dans la mesure où, aujourd’hui en occident, nos modes de vies sont peu dictés par des principes religieux.
Par contre, sur les réseaux sociaux ont voit fleurir quantité d’opinions personnelles. L’information est à disposition mais elle n’est pas hiérarchisée et il peut s’avérer difficile de faire le tri.
Pour ma part, je sais par exemple que durant Covid, je n’avais pas l’énergie d’aller chercher l’information à la source, dans les publications scientifiques. Je me suis donc entourée d’une communauté d’amis, chercheurs, reconnus par leurs pairs en biologie qui publiaient des informations sur les réseaux. J’ai considéré que ces informations étaient fiables dans la mesure où c’étaient des personnes qui avaient une expertise sur le sujet.
Opinion publique et manipulation
La majorité des opinions personnelles sur un sujet, une thématique donnée compose l’opinion publique.
Si cette opinion publique sert un intérêt et qu’on cherche à l’influencer, on glisse alors dans l’idéologie.
Pour rappel, l’idéologie est un système prédéfini d’idées à travers lequel on analyse le monde, une sorte de filtre somme toute.
Daily Science nous dit que dans un discours idéologique, il est courant de prendre un bout de savoir dans un champ donné, où il est légitime, et ensuite de l’exporter dans un autre champ pour mieux l’instrumentaliser. L’interlocuteur ne fournit alors pas de preuves scientifiques de son raisonnement mais utilise des termes ou des références qui ont l’apparence du scientifique. C’est par exemple ce qu’on observe dans les discours complotistes.
Aussi, il est parfois difficile d’identifier la nature et la source d’une information. On court alors le risque de glisser vers de la manipulation.
Si la question de la manipulation vous intéresse, je vous invite à regarder la vidéo ici.
C’est un cas d’espèce. On décrypte très bien comment le YouTubeur de la chaine de vulgarisation scientifique Dirty Biology a été approché, en pleine pandémie pour faire passer un message sur la vaccination qui n’avait, mais alors rien du tout, de scientifique !
Développer notre esprit critique
La manipulation ça existe et il est important de questionner nos conceptions afin de déterminer si elles sont :
- Scientifiques.
Est-ce qu’elles sont basées sur l’expérience, sur des preuves répétées acquises par la communauté scientifique ? - Liées à une croyance.
C’est-à-dire est-ce qu’elles font référence pour une certaine part au divin, au surnaturel, ou à un système de valeur établi par des religions ? - Liées à une opinion personnelle
Est-ce que nos conceptions tiennent pour partie à une démonstration rationnelle et, pour une autre part, à la confiance qu’on place dans la parole de notre interlocuteur ?
Pour questionner nos conceptions par le jeu, j’ai créé la Murder clé en main « 2184:(R)EVOLUTION en collaboration avec les Conservatoire et jardin botaniques de Genève.
Intéressés à participer à la Murder Party ou désireux d’organiser l’événement dans votre établissement pour vos publics ? N’hésitez pas à me contacter.
Merci de liker cette vidéo / cet article si cela vous a plu. À bientôt
Sources :
- Bikfalvi Andreas, Science, vérité et croyances, Med Sci (Paris), vol. 34, n°11, novembre 2018 : https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2018/12/msc180160/msc180160.html
- Conservatoire et jardin botanique de Genève et al., Le grand bazar de l’évolution, Regarder notre Terre, 2020.
- Grasset Léo, chaîne de vulgarisation scientifique Dirty Biology : Comment une agence russe a essayé de m’utiliser – DBY #79, YouTube : https://youtu.be/dEuWVgh-d6Q
- Haddad Leïla & Dupart Guillaume, Mondes : mythes et images de l’univers, Editions Seuil, 2006
- Krivine Jean-Paul, Science, expertise et décision à l’épreuve de la pandémie de Covid-19, Association française pour l’information Scientifique, 15 juillet 2020 : https://www.afis.org/Science-expertise-et-decision-a-l-epreuve-de-la-pandemie-de-Covid-19-4428
- Theunis Laetitia, Savoir, croyance, opinion et idéologie : comment les distinguer, Daily Science, 29 novembre 2019 : https://dailyscience.be/29/11/2019/savoir-croyance-opinion-et-ideologie-comment-les-distinguer-2/
- Wikipedia, page sur René Descartes : https://fr.wikipedia.org/wiki/Ren%C3%A9_Descartes